Le bilan à mi-parcours de la présidence française du Conseil de l’Union européenne

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Organisée sous le triptyque « Relance, puissance, appartenance », la présidence française a dû faire face, depuis le 24 février, à l’irruption sur le continent européen d’un conflit intense et meurtrier avec l’agression russe en Ukraine. Ce contexte souligne l’urgence, pour l’Union européenne, de se renforcer pour protéger ses citoyens et pour défendre ses valeurs et ses intérêts dans son voisinage proche et lointain et confirme la pertinence du fil rouge choisi pour cette 13ème présidence française du Conseil de l’Union européenne : le renforcement de la souveraineté européenne dans tous les domaines.

La France a ainsi agi sur deux fronts, dans son rôle de présidence du Conseil de l’Union :

1. Aux côtés des deux autres institutions, la Commission européenne et le Parlement européen, la présidence française s’est mobilisée en faveur d’une réponse rapide, unie et forte à l’agression russe. L’Union européenne a ainsi :

• adopté un ensemble de sanctions sans précédent à l’encontre de la Russie avec quatre trains de mesures visant les responsables russes et leur capacité à financer le conflit ;

• pris des mesures d’urgence en soutien à l’Ukraine et aux Ukrainiens, à travers un appui militaire inédit, l’activation de la protection temporaire pour les réfugiés, une assistance financière directe et indirecte à l’Ukraine, la synchronisation du réseau électrique ukrainien au réseau européen, en complément de la mobilisation des États membres ;

• engagé au Sommet de Versailles, les 10 et 11 mars, un travail urgent pour accélérer la réduction des dépendances européennes, en particulier dans le domaine de l’énergie, dépendances qui sont très fortes dans certains États membres et constituent une vulnérabilité persistante pour l’ensemble de l’Union. La Commission fera au mois de mai des propositions concrètes visant à réduire de deux tiers cette dépendance énergétique d’ici la fin de l’année, ce qui permettra de renforcer encore davantage la pression sur la Russie ;

• entrepris un effort de rattrapage des investissements dans le domaine de la défense, pour généraliser les décisions majeures prises en ce sens dans plusieurs États membres et renforcer les capacités et la base industrielle européennes.

2. En dépit de la guerre en Ukraine, qui a naturellement affecté très significativement l’agenda de la présidence française, cette dernière a néanmoins réussi à maintenir le cap en poursuivant les travaux sur les priorités définies initialement qui visent toutes à renforcer la cohésion de l’Union et sa capacité à agir.

Des avancées majeures ont été obtenues dans trois domaines en particulier, et seront poursuivies au deuxième trimestre :

D’abord, plusieurs instruments législatifs majeurs qui visent à assurer un meilleur respect des intérêts de l’Union en matière commerciale, climatique et numérique ont été adoptés.

Ainsi, en matière commerciale, l’instrument de réciprocité dans l’accès aux marchés publics a fait l’objet d’un accord complet le 14 mars 2022 après 10 ans de négociations : il nous aidera à garantir des conditions de concurrence équitable pour nos entreprises et à leur créer des opportunités à l’international. Dans le même esprit, la France a plaidé pour le respect par les produits importés des normes européennes en matière agricole et environnementale.

En matière de transition écologique, le mécanisme d’ajustement carbone aux frontières a fait l’objet d’un accord politique le 15 mars 2022 : en garantissant des règles du jeu loyales entre toutes les entreprises qui commercent sur le marché intérieur, ce mécanisme incitera les États non-européens à mener une politique climatique plus ambitieuse et assurera que nous ne perdons pas nos usines et nos emplois au profit de pays pollueurs. C’est une première mondiale et un élément essentiel du paquet d’ajustement à l’objectif -55 % (des émissions de gaz à effet de serre d’ici 2030 par rapport à 1990), sur lequel nous allons poursuivre les négociations. En outre, un accord au Conseil le 17 mars a acté la constitution d’une filière européenne de production de batteries, qui renforce la dynamique en faveur de l’économie circulaire, de l’excellence technologique et de la réindustrialisation de l’Union.

Enfin, en matière numérique, la législation sur les marchés numériques (le « Digital Markets Act ») a fait l’objet d’un accord complet le 24 mars : c’est le premier cadre de régulation de ces marchés au monde, qui va permettre de mettre fin aux pratiques déloyales de certaines entreprises numériques qui imposent leurs propres règles. La présidence française va par ailleurs poursuivre ses efforts sur le deuxième grand chantier législatif relatif aux services numériques (le « Digital Services Act »), qui doit assurer une meilleure responsabilisation des grandes plateformes numériques concernant les contenus qu’elles diffusent. La guerre en Ukraine démontre que c’est là une nécessité commerciale mais aussi démocratique et stratégique.

Ensuite, sur le plan de la cohésion et des valeurs de l’Union européenne, la présidence française a utilisé tous les outils à sa disposition dans le domaine de l’État de droit. Elle a ainsi engagé un débat sur le renforcement de ces outils, y compris le règlement sur la conditionnalité liée à l’État de droit, désormais en vigueur, qui permet de prendre des mesures contre toute violation dans ce domaine ayant un impact sur le budget européen. Elle a également engagé la révision du règlement relatif au financement des partis politiques européens, qui interdira notamment aux pays non membres de l’Union européenne de financer les partis politiques européens. Une avancée majeure a par ailleurs été obtenue en matière d’égalité entre les femmes et les hommes avec l’approbation par le Conseil le 14 mars de la proposition de directive, bloquée depuis 10 ans, visant à assurer une meilleure participation des femmes dans les conseils d’administration.
Enfin, un accord a été obtenu le 24 février au Conseil sur la directive relative à la performance non-financière des entreprises, qui fera de l’Europe une pionnière dans la prise en compte par les entreprises des risques sociaux et environnementaux.
Dans le domaine de la gestion des frontières, la création d’un Conseil des ministres Schengen renforce la cohérence des décisions prises par les États membres et l’Union européenne en matière d’asile et de migrations.

Enfin, s’agissant de l’avenir de l’Union, les travaux sur la Conférence sur l’avenir de l’Europe ont progressé, et donneront lieu à la remise le 9 mai prochain d’un rapport qui reprendra les propositions des citoyens.

Cette réflexion sur l’avenir de l’Union doit également intégrer la nécessité pour une Europe souveraine de s’assumer comme un véritable acteur géopolitique. C’est le sens des orientations contenues dans la Boussole stratégique, « Livre blanc » de la défense et de la sécurité européenne endossé par le Conseil européen des 24 et 25 mars 2022.

Une Europe souveraine suppose notamment de jouer pleinement son rôle dans les grandes aires géographiques où se joue une grande part de sa sécurité et de sa prospérité. C’est dans ce contexte qu’a été organisé le 22 février dernier le premier Forum entre l’Union européenne et les pays de l’Indopacifique, afin de structurer l’action de l’Union européenne dans cet espace. De même, le grand sommet international de notre présidence s’est tenu le 17 février entre les pays de l’Union européenne et ceux de l’Union africaine : le partenariat, qui est sans équivalent, a été réaffirmé, ainsi que la volonté commune de le renouveler en s’appuyant notamment sur un paquet d’investissements de 150 milliards d’euros. Celui-ci aura vocation à renforcer la diversification des économies, inclusives, durables et résilientes et de renforcer la stabilité et la souveraineté respective des deux continents.

Cette souveraineté, l’Europe doit également être en mesure de l’assumer dans les espaces communs contestés. C’est dans cet esprit que plusieurs initiatives qui ont été lancées, avec notamment l’élaboration d’une stratégie spatiale de sécurité et défense européenne, la validation de l’extension de la présence maritime coordonnée au Nord-Ouest de l’Océan Indien, ou encore la mise à jour de la stratégie de sureté maritime de l’Union européenne.

Les trois prochains mois de la présidence du Conseil de l’Union européenne permettront de poursuivre la mise en œuvre des priorités.

Dernière modification : 20/04/2022

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